Archétype de la comédie modeste et réussie, « Une affaire qui roule » s’avère être une des bonnes surprises du cinéma français de ce début d’année 2003. Quelques ingrédients scénaristiques simples et efficaces, des comédiens excellents dans leur registre et un climat d’ensemble très attachant en font un film certes mineur mais hautement réjouissant.

Réussir sa vie …

La minceur de l’intrigue surprend et rend même perplexe dans les premières minutes. Un cuisinier, lassé de travailler pour un restaurateur qui refuse ses idées, claque la porte pour monter sa propre affaire. Très motivé, il participe à un stage destiné à aider les créateurs d’entreprise, animé par Claude (joué par le toujours formidable Denis Podalydès). Le contraste entre les deux personnages principaux joue alors à plein. Jean-Jacques, le cuisinier semble véritablement obsédé par son objectif, plein d’ambitions et déterminé à ne rien laisser au hasard alors que Claude, son formateur, lui, paraît toujours ailleurs, absent presque, ne croyant pas une seconde à l’efficacité de ses cours. La raison en est simple, il rêve d’écrire et supporte difficilement son métier, comédie permanente de l’apparence et de l’hypocrisie.

Le petit miracle du film se produit alors. Sans tirer à la ligne, Eric Veniard construit un récit ténu mais très drôle, d’une grande fluidité. Les péripéties s’enchaînent, Jean-Jacques se heurte à de grandes difficultés dans sa recherche de financement et son couple traverse une période délicate. Il sombre dans une sorte de dépression et devient progressivement dépendant d’un médicament, qui a pour effet secondaire de désinhiber ceux qui l’absorbent.

Une formidable interprétation

Il faut saluer ici la grande performance de Clovis Cornillac, qui joue le rôle de Jean-Jacques. De bout en bout, il est impressionnant de présence, par son physique massif et son apparence déterminée qui contrastent fortement avec sa fragilité intérieure. Il dégage une forme de lourdeur, emprunte d’émotion et de drôlerie.

Le duo d’acteur qu’il compose avec Podalydès constitue le principal atout du film. Ce dernier joue peut-être dans son registre déjà connu, de lunatique hésitant, dévoré par le doute et en perpétuel décalage mais il provoque toujours autant l’hilarité. Il est victime, comme tous les personnages du film, de ce fameux médicament qui révèle, cruellement, la nature profonde de chacun. De la compagne de Jean-Jacques (très bien interprétée par Axelle Laffont) aux parents de celle-ci, tous en sont victimes, impitoyablement.
Sans surprise, un happy end conclut le film. Chacun, grâce à l’autre, se découvre réellement et réalise son rêve.


Baignée dans une atmosphère délicieusement surréaliste, où les événements se succèdent avec légèreté mais sans niaiserie, « Une affaire qui roule », sans atteindre des sommets, est une des meilleures comédies françaises, vues depuis longtemps.